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Delphine Loyer
Avocat spécialiste en Droit des Assurances

Le devoir de conseil des intermédiaires d’assurance à l’épreuve de la crise sanitaire

Le devoir de conseil et d’information général des intermédiaires d’assurance

L’intermédiation en assurance se définit comme l’activité qui consiste à présenter, proposer, ou aider à conclure des contrats d’assurance ou de réassurance ou à réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion (C. assur., art. L. 511-1, al. 1er).

En ce sens, l’intermédiaire doit faire en sorte que celui qui est à la recherche d’une couverture d’assurance s’engage, contre le paiement d’une prime déterminée, dans un contrat d’assurance efficace et adapté à ses besoins, sur lequel il doit pouvoir compter dans l’éventualité de réalisation du risque. Ce devoir s’applique tant à l’égard de l’agent général que du courtier en assurance :

  • L’agent général met à la disposition de son ou de ses mandants sa compétence professionnelle en vue de l’offre de contrats et de services d’assurances pour satisfaire les besoins de la clientèle.Et c’est de l’exécution correcte de ses prestations auprès de la clientèle que dépend l’exécution correcte de ses obligations à l’égard de l’assureur. L’obligation de conseiller le choix du contrat conforme aux besoins du client est prolongée par l’assistance fournie lors de la souscription du contrat, de son exécution et de ses révisions.
  • Le courtier met en rapport un candidat à l’assurance et un assureur en vue de la conclusion d’un contrat d’assurance. L’obligation de conseil fût très tôt imposée au courtier par la jurisprudence (Cass. 1re civ., 10 nov. 1964, n° 62-13) et régulièrement rappelée (Cass. 1re civ., 6 nov. 1984, n° 83-14.020). Cette obligation à l’origine prétorienne a été récemment renforcée par le législateur.

Un devoir renforcé par la Directive sur la distribution d’assurance

La directive sur la distribution d’assurance (directive n°2016/97 du 20 janvier 2016) tend à apporter, au sein de l’Union européenne, une meilleure protection des consommateurs dans leurs relations avec l’ensemble des distributeurs d’assurance, et notamment avec les intermédiaires d’assurance.

Transposée en droit français par l’ordonnance n°2018-361 du 16 mai 2018 et par le décret n°2018-431 du 1er juin 2018, cette directive est désormais applicable en France depuis le 1er octobre 2018.

Cette nouvelle réglementation a for- tement renforcé le devoir de conseil des intermédiaires d’assurance, les- quels sont non seulement tenus de conseiller « un contrat qui est cohé- rent avec les exigences et les besoins du souscripteur », mais doivent éga- lement préciser « les raisons qui motivent ce conseil » (C.assur., art. L.521-4 -I al.2).

Ces précisions doivent être adaptées en fonction de la complexité du contrat et être communiqués sous une forme compréhensible et non trompeuse afin de permettre au souscripteur éventuel de prendre une décision en toute connaissance de cause (C.assur., art. L.521-4 -III).

Une exigence de formalisation et de traçabilité du conseil donné est donc de rigueur, puisqu’il appartient à l’intermédiaire, de prouver qu’il a fourni l’information et le conseil adéquat.

En qualité de distributeurs, les intermédiaires sont également tenus de remettre au souscripteur éventuel le Document d’Information sur le Produit d’Assurance (document d’information standardisé pour les produits d’assurance non-vie également connu sous l’acronyme IPID), afin de faciliter la compréhension des consommateurs quant au contenu du produit d’assurance.

L’impact de la crise sanitaire liée au Covid19 sur le devoir de conseil des intermédiaires

La crise sanitaire liée au Covid19 a impliqué une forte sollicitation des intermédiaires d’assurance, lesquels ont été amenés à mettre en place un accompagnement personnalisé à l’égard de leurs clients.

En ce sens, par un communiqué du 21 avril dernier, l’ACPR a appelé les professionnels de l’assurance et notamment les intermédiaires à permettre à leurs clients de d’entrer en contact avec eux et de maintenir un lien nécessaire (précisions sur l’étendue des garanties, opportunité de les faire évoluer, de déclarer un sinistre ou encore d’indiquer les formalités à accomplir pour être indemnisés) (cf. Communiqué ACPR du 21 avril 2020).

Malgré l’impossibilité d’accueillir du public, les intermédiaires ont donc du utiliser l’ensemble des moyens technologiques pour continuer à conseiller leurs clients, pour étudier leur situation personnelle et pour déterminer l’aide la plus appropriée à mettre en œuvre. Cet accompagnement s’est notamment avéré indispensable tant en dehors que dans le cadre d’un sinistre (par exemple sur l’éventuelle prise en charge par les assureurs des pertes d’exploitation liées à la pandémie).

L’absence de prise en charge contractuelle des pertes d’exploitation a par ailleurs mis en exergue un rôle pédagogique des intermédiaires, afin d’expliquer que le principe de mutualisation des risques sur lequel repose le dispositif assurantiel pouvait, selon les contrats, justifier l’absence de prise en charge des pertes d’exploitation (cf. Lettre ouverte de l’AGEA du 7 mai 2020).

Toutefois si l’ensemble des intermédiaires ont été fortement sollicités, l’impact de la crise sanitaire n’a pas été perçue de la même manière selon les intermédiaires. En effet, 59% des courtiers et seulement 20% des agents généraux estiment que leur organisation était adaptée pour faire face à la crise, selon une étude menée par la banque Cambon Partners.

Par ailleurs, 59% des intermédiaires sondés estiment que la crise sanitaire devrait avoir pour effet d’accentuer la distribution digitale et de provoquer la montée en puissance de la vente à distance, laquelle fait l’objet d’un contrôle rigoureux de l’ACPR et de la DGCCRF (ACPR sanct., 18 févr. 2020, n°2019-15).

Cette dématérialisation annoncée nécessitera à n’en pas douter, une vigilance accrue des intermédiaires afin de permettre la bonne exécution de leur devoir de conseil à l’égard de leurs clients.

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